Traitement chirurgical des anévrysmes de la circulation antérieure

, par  Julien Engelhardt , Emmanuel Cuny , Guillaume Penchet , popularité : 8%

IV. Critères requis pour poser l’indication et préparer la chirurgie :

IV.1. Diagnostic positif de l’hémorragie sous-arachnoïdienne :
Le diagnostic d’HSA est réalisé au moyen d’un T.D.M. sans injection de produit de contraste. Son diagnostic étiologique (anévrysme) ainsi que le planning pré-chirurgical peuvent être réalisés au moyen d’un angioscanner ou d’une angiographie (gold standard). En cas de doute (TDM normal et céphalée ictale typique avec anévrysme à l’angioscanner), une ponction lombaire avec recherche de pigments xantochromiques en spectrophotométrie dans le surnageant après centrifugationest classiquement indiquée. Cependant, ses résultats dépendent du délai entre le saignement et la ponction, et la sensibilité et spécificité de la recherche de pigments varient entre 85 – 100% et 75 – 95 % respectivement. Pour ces raisons, nous lui préférons la réalisation d’une IRM sur laquelle l’HSA est affirmée sur la séquence FLAIR (T2 écho de gradient en cas d’HSA ancienne).

IV.2. Diagnostic étiologique de l’HSA (anévrysme) :

2.a. Angioscanner :


Bien que l’angiographie reste l’examen de référence en matière d’anatomie vasculaire intracrânienne, il est clairement admis depuis le début des années 2000 que l’angioscanner présente une excellente sensibilité et spécificité dans la détection des anévrysmes lors d’une HSA, respectivement de 92,5 à 98% et de 93,3 à 100% 12. De plus, l’angioscanner présente l’avantage non négligeable d’être un examen non invasif, présentant pour seul risque celui de l’injection de produits de contraste iodés (allergie, néphropathie aiguë, interaction avec les antidiabétiques oraux), réalisable en urgence à l’arrivée du patient en réanimation ou en hôpital périphérique avant le transfert. L’angioscanner est donc devenu l’examen de première intention dans le diagnostic étiologique d’une HSA. Cependant, il est indispensable de connaître les critères de qualité de cet examen avant de pouvoir l’interpréter, pour éviter de fausses conclusions. 4 critères doivent être analysés : l’intensité du rehaussement artériel qui doit être d’au moins 100 unités Hounsfield pour obtenir un contraste suffisant avec les structures de voisinages, notamment osseuses ; la quantité de vaisseaux opacifiés, le trajet exploré et surtout l’absence d’opacification veineuse (« pollution veineuse »). Le dernier critère est primordial car illustratif de la qualité du couplage (timing) injection – acquisition, garant des meilleures VPP et VPN (valeur prédictive positive ou négative). Enfin, comme toute imagerie numérique, le post-traitement de l’image sur la console de radiologie ou grâce à des logiciels dédiés tient une place à ne pas négliger. Actuellement, aucune conclusion ne peut être rendue en ayant juste visionné les coupes natives de l’examen, tant les techniques de reformation multiplanaire (MPR) dans au moins les 3 plans de l’espace avec épaississement des coupes et utilisation des pixels d’intensité maximale (MIP) permettent d’améliorer le seuil de détection des malformations vasculaires pouvant être confondues sur les coupes natives avec le réseau artériel normal 13.

En plus de ses performances diagnostiques quasi comparables à l’angiographie, l’angioscanner est également très intéressant pour la préparation de la chirurgie. Le post-traitement des acquisitions de l’angioscanner permet une reconstruction 3D du crâne du patient et de son polygone de Willis (mode VR), facilement manipulable et permettant à l’opérateur de positionner le crâne du patient dans la position opératoire souhaitée. Dans ce cas, l’avantage non négligeable du scanner par rapport à l’angiographie est la visualisation concomitante de la boîte crânienne, pouvant être « découpée » en simulant une craniotomie et permettant de prévoir les obstacles osseux lors de l’abord, telle une petite aile ou une apophyse clinoïde antérieure devant être fraisée. Toujours dans la planification de l’abord osseux, l’analyse de l’étendue latérale du sinus frontal est primordiale avant tout volet ptérional notamment si une extension frontale est envisagée. L’angioscanner, contrairement à l’angiographie, permet également de répondre aux premières questions que doit se poser l’opérateur : existe-t-il une hydrocéphalie aiguë à dériver ? Les citernes sont-elles caillottées, le chirurgien ne pouvant dans ce cas que très peu compter sur le drainage du LCS cisternal pour parfaire la détente cérébrale ? Existe-t-il un hématome intra-parenchymateux à évacuer en premier lieu ? Ainsi, depuis les années 2000, il est clairement admis que l’angioscanner est l’examen de première intention pour le diagnostic étiologique des HSA et pour le planning pré-chirurgical, l’angiographie n’étant plus indispensable dans la majorité des cas 14.

2.b. Angiographie :

L’angiographie, réalisée pour la première fois en 1927 par Moniz, est encore aujourd’hui l’examen de référence (gold standard) dans le diagnostic étiologique des HSA. Elle constitue également le premier temps de tout geste endovasculaire, mais a été remplacée dans la majorité des cas par l’angioscanner, non invasif, pour le planning pré-chirurgical. A l’heure actuelle, dans la majorité des centres européens, l’angiographie n’est réalisée à titre diagnostique qu’en cas de négativité de l’angioscanner devant une HSA confirmée, et à titre pré-thérapeutique systématiquement avant tout geste endovasculaire et au cas par cas avant le geste chirurgical. Dans ce dernier cas, elle apporte une finesse indéniable dans l’étude de la configuration anatomique de l’anévrysme et de ses rapports avec les artères collatérales et le tronc porteur. De plus, grâce à son caractère numérisé, comme l’angioscanner, les possibilités de post-traitement permettent également une rotation dans la position opératoire. Il ne faut donc pas se priver de cet examen, bien qu’invasif et nécessitant une organisation plus lourde qu’un simple scanner, lors des cas d’anévrysmes complexes dont l’anatomie n’est pas parfaitement comprise sur l’angioscanner.Cependant, comme devant tout examen, il faudra en connaitre les limites, à savoir principalement celle de la sous-estimation de la taille de l’anévrysme, l’image angiographique n’étant qu’une image en « négatif » de la lumière artérielle et anévrysmale. Ainsi, seule la portion circulante d’un anévrysme thrombosé ou calcifié sera visualisée. Il est donc recommandé de toujours bien vérifier la concordance entre les données de l’angioscanner (toujours réalisé a priori) et de l’artériographie, pour éviter des mauvaises surprises, voire de compléter l’exploration par une IRM dans le cas d’un anévrysme géant.