Stimulation cérébrale profonde dans le traitement de la maladie de Parkinson

, par  Michel Lefranc , popularité : 3%

I. Définition

La Stéréotaxie est une méthode neurochirurgicale qui l’on pourrait définir comme l’ordonnancement (ou mise en ordre) dans l’espace cérébral. Il s’agit d’une approche à crâne fermé d’une structure cérébrale, siège d’une fonction que l’on veut modifier, moduler ou d’une lésion que l’on désire biopsier et/ou traiter.

La méthode stéréotaxique consiste en l’acquisition de données issues de diverses modalités d’imagerie et en leur transfert dans un système de cordonnées cartésiennes. Chaque structure est déterminée par ses coordonnées en x,y,z.
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La Stimulation cérébrale profonde (SCP) consiste à repérer une cible dans le cerveau pour y amener avec précision et innocuité une ou plusieurs électrodes pour moduler l’activité électrique cérébrale anormale de la structure visée. La mise en place des électrodes de stimulation se fait par voie stéréotaxique.

La modalité de stimulation la plus utilisée est la stimulation haute fréquence permettant d’obtenir une inhibition fonctionnelle de la structure(6,13) cependant l’évolution de la technique amène aujourd’hui à proposer dans des cas particuliers des stimulations à basse ou moyenne fréquence(18,42). Le schéma ci-dessus (d’après Benabid et al.) synthétise les possibles modes d’actions isolés ou combinés de la stimulation cérébrale profonde (6).

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De manière très schématique, on peut retenir que la stimulation haute fréquence entraîne une inhibition fonctionnelle des structures ganglionnaires alors que la stimulation basse fréquence entraîne une « activation » de ces structures. De manière concomitante, toutes les modalités de stimulation entraînent la réalisation de potentiels d’action (excitation) quand un axone est stimulé.

Si la stimulation haute fréquence est responsable d’une inhibition fonctionnelle similaire à une lésion, adaptable à souhait grâce à la programmation du pacemaker (plots, intensité, fréquence, largeur d’impulsion), le mécanisme d’action exact de la stimulation cérébrale profonde reste inconnu. La stimulation cérébrale profonde est une technique adaptable aux besoins de chaque patient, non lésionnelle et totalement réversible.

*a. Physiopathologie des ganglions de la base

Pour comprendre les évolutions actuelles de la SCP en particulier la diffusion des cibles et pathologies traitées par cette technique, il convient que le lecteur ait une vision - au moins schématique - du fonctionnement des ganglions de la base et de leur communication avec le cortex cérébral. Le but de cette section n’est donc pas de donner une vision exhaustive de leur fonctionnement mais schématique, visant à comprendre les cibles chirurgicales. Nous ne rentrerons pas dans le détail des différentes pathologies et des dysfonctionnements qu’ils provoquent dans cette organisation ; ces derniers seront développés dans les chapitres dédiés aux pathologies.

Les ganglions de la base forment une structure anatomo-fonctionnelle extrêmement complexe non encore complètement élucidée à ce jour. Cependant, on présente leur organisation comme un ensemble relativement unidirectionnel consistant en des boucles cortico sous-corticales parallèles et potentialisatrices de la commande corticale(44,1,16,15). Chaque ganglion a une organisation somatotopique bien définie regroupée en trois grands systèmes : le système limbique, le système associatif et le système sensori-moteur.
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Illustration de l’organisation des ganglions de la base (selon Obeso et al.)

Ainsi, bien loin d’une structure visant uniquement à réguler le mouvement, les ganglions de la base se présentent comme une « boîte noire » organisée dans le seul but de soulager, automatiser et potentialiser la commande corticale motrice mais également limbique (émotions, mémoire, etc.) et associative (choix, interaction avec le monde extérieur, etc.).

Ces récentes descriptions ont été à la base d’une meilleure compréhension mais également la source de nouvelles cibles de neuromodulation non seulement pour des pathologies du mouvement telles que la Maladie de Parkinson, les dystonies, les tremblements, mais également depuis quelques années pour des pathologies psychiatriques tels que les troubles obsessionnels compulsifs ou les syndromes dépressifs majeurs, la maladie de Gilles de la tourette(24)…
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Illustration des boucles parallèles cortico sous-corticales. Les noyaux gris centraux potentialisent et automatisent la commande corticale.

A titre illustratif, le noyau subthalamique pourtant d’une petite taille (5,9mm en Antéro postérieur) * 3,7 mm en Médio latérale) * 5 mm en dorsoventrale)(40) présente une partie sensori motrice dorso latérale, une portion ventrale limbique et entre les deux, une portion associative. Chaque ganglion de la base présente une organisation similaire.

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Le pôle d’entrée de ce système est représenté par le striatum (putamen, noyau caudé et noyau accumbens) et pour une part beaucoup moins importante le noyau subthalamique (NST) (voie hyperdirecte). Le pôle de sortie est constitué par le globus pallidus internus (Gpi), de la substance noire pars réticulata (SNr) et du pallidum ventral segment médian (PVm). Ces structures projettent essentiellement vers le Thalamus dernier relais avant un retour vers le cortex (boucle) mais également vers la moelle épinière, les réseaux réticulaires et le tronc dans le but de la transmission du message (moteur, associatif, etc.)(12,1)

Entre ces deux pôles, il existe des niveaux intermédiaires (Globus pallidus externe (Gpe), NST, mais également pallidum ventral segment latéral (PVl)) participant au traitement dynamique et à la modulation des informations agissant ainsi à la fois comme des relais de transmissions mais également comme des régulateurs internes.
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Enfin, il existe non seulement une organisation spatiale mais également temporelle permettant le choix du programme (moteur / associatif / limbique, etc.) le plus approprié.