Traitement chirurgical des anévrysmes de la circulation antérieure

, par  Julien Engelhardt , Emmanuel Cuny , Guillaume Penchet , popularité : 10%

SYNTHESE DE L’ACTE CHIRURGICAL :

anévrysme de l’artère communicante postérieure

5. Cas particulier desanévrysmes de l’artère communicante antérieure :

a. Généralités :
Les anévrysmes localisés sur le complexe de l’artère communicante antérieure (ACoA) sont les plus fréquents (30-40%) mais aussi les plus souvent traités par embolisation. Ils se rompent pour une taille moyenne plus petite que les anévrysmes sylviens et carotidens avec des morphologies de collet souvent favorables au geste endovasculaire, et sont très rarement responsables d’hématomes intra-parenchymateux nécessitant un geste chirurgical. Ils sont en revanche souvent responsables d’hydrocéphalie aiguë par effraction de lalamina terminalis. Ils correspondent au type d’anévrysme le plus largement représenté dans la cohorte ISAT.

La très grande variabilité anatomique des axes cérébraux antérieurs (de l’artère azygos en passant par l’existence d’une hypoplasie du segment A1 d’une des 2 artères cérébrales antérieures à l’artère médiane du corps calleux et la fenestration artérielle) rend difficile une classification anatomique simple et on utilise plus volontiers la projection du sac anévrysmal par rapport aux axes A2 des artères cérébrales antérieures pour la définition chirurgicale de l’anévrysme : projectionantérieure, dans le plan des nerfs optiques ;inférieure,vers la base du crâne ;supérieure, dans le plan des troncs A2 etpostérieure, en arrière de l’angle A1/A2. Cette classification est très utile pour évaluer les difficultés prévisibles de la dissection et de la pose du clip, souvent simples dans le deux premiers cas et parfois beaucoup plus complexes pour les 2 autres. A côté de cette classification, il est intéressant de noter que dans un bon nombre de cas, l’anévrysme de l’artère communicante antérieure n’est pas à projection strictement médiane (quelque soient les 4 cas précédents) mais latéralisée, dans le sens du flux de l’artère A1 dominante et vers l’artère A1 hypoplasique. Cet aspect revêt toute son importance dans le choix du côté de l’abord.

b. Principes généraux de l’abord

Plusieurs voies d’abord peuvent être utilisées pour le traitement d’un anévrysme de l’artère communicante antérieure : voie fronto-ptérionale, voie sourcilière et voie inter-hémisphérique de Suzuki. La voie ptérionale élargie ou fronto-ptérionale est la plus classique. Il s’agit d’un volet ptérional dont on agrandit la découpe frontale au ras de la base du crâne en avant du pilier orbitaire. L’ablation du ptérion et le fraisage des aspérités osseuses du toit orbitaire sont souvent nécessaires pour faciliter l’application du clip. Le premier temps microchirurgical est celui de l’ouverture de la citerne opto-carotidienne puis du tiers inférieur de la vallée sylvienne. Les adhérences du cortex frontal sur le nerf optique sont progressivement libérées afin d’identifier le tronc de l’artère cérébrale antérieure. Celui-ci est dégagé de façon à entrevoir l’émergence de l’artère récurrente de Heubner et du tronc A2. La dissection se poursuit alors sur l’anévrysme lui-même et l’axe cérébral antérieur contro-latéral.

c. Choix du côté de l’abord

Cet aspect est essentiel et dépend de l’existence d’un axe A1 prédominant d’un côté, de la projection latérale du sac anévrysmal, de la zone de rupture éventuelle et de l’existence d’un hématome frontal associé. Le choix est donc guidé par l’imagerie pré-opératoire et veille à avoir le contrôle d’un tronc A1 principal et à éviter l’abord premier de la phlyctène de rupture. Dans les cas strictement symétriques, l’abord par le côté non dominant du patient et si possible dominant du chirurgien est recommandé.

d. Dissection de A1 :
L’ouverture du tiers inférieur de la vallée sylvienne est utile pour repérer la terminaison carotidienne et la portion proximale du tronc A1 de l’artère cérébrale antérieure. Cette ouverture facilite la libération des adhérences entre le cortex frontal et le nerf optique et par conséquent l’écartement progressif du cerveau vers le complexe communicant antérieur. Il est toutefois fréquent que la naissance de l’artère cérébrale antérieure soit très postérieure, parfois au contact du chiasma optique. Il n’est pas toujours utile d’avoir le contrôle de l’ensemble du tronc A1 et dans ce contexte, on peut limiter le point de départ de la dissection au croisement ACA/Nerf optique.

e. Résection du gyrus rectus et ouverture du sillon interhémispherique

Cette résection est parfois indispensable lorsque la projection latérale du complexe de l’artère communicante antérieure est haut située ou lors d’un sac anévrysmal à projection supérieure ou postérieure. Cette résection est menée de la projection de la face médiale du nerf optique vers le sillon interhémisphérique, par voie sous-piale et sur environ 3 à 5mm de hauteur. L’indentification de l’artère récurrente de Heubner est indispensable afin d’éviter tout risque de lésion par coagulation intempestive. Cette résection est utilement complétée par l’ouverture du sillon interhémisphérique antérieur, du bas vers le haut. L’utilisation d’un écarteur auto-statique est le plus souvent indispensable lors de cette étape. La résection s’étend jusqu’au contrôle de l’angle A1/A2 homolatéral, de l’artère de Heubner et parfois à la face postérieure de la partie proximale du tronc A2. La dissection est alors poursuivie et dégage progressivement l’artère communicante antérieure puis l’axe A1/A2 controlatéral. En règle générale, cette dissection permet de visualiser le collet de l’anévrysme et d’envisager le positionnement du clip définitif.

f. Adhérences aux nerfs optiques et à la base du crâne

Ces adhérences augmentent le risque de rupture prématurée de l’anévrysme lors de l’écartement du cortex frontal ou de l’ouverture de la citerne inter-optique. Lorsque leur libération est dangereuse, il est préférable d’envisager de dégager le collet de l’anévrysme par une résection sous-piale.

g. Eléments à prendre en compte en fonction de la projection du sac :


projections du sac : de gauche à droite : antérieure, supérieure, postérieure, inférieure.

- Projection antérieure et ou antéro-inférieure (figure 16E) : attention aux ruptures prématurées par traction sur le lobe frontal. Sens de dissection : A1/A2 homolatéral, A2 controlatéral, sac. Contrôle de A1 controlatérale après clippage.

- Projection supérieure : dôme anévrysmal « enfoui » dans le parenchyme : intérêt de la dissection sous-piale au niveau du gyrus rectus +++ Sens de dissection : A1 des 2 côtés, A2 homolatéral, sac puis A2 controlatérale de façon rétrograde.

- Projection postérieure (figure 16D) : intérêt de la gyrectomie et dissection étendue de la scissure inter-hémisphérique. Sens de la dissection : idem projection supérieure.

- Projection inférieure : le contrôle de A1 et A2 des 2 côtés est simple. Le problème réside dans le exclusion par clip, avec toutes les perforantes de la communicante antérieure descendant vers le chiasma souvent collées au sac et/ou collet de l’anévrysme.